No home, Yaa Gyasi

L’histoire…

Nous sommes au XVIIIe siècle. L’esclavage est en plein essor au Ghana. Deux sœurs, Effia et Esi, naissent de la même mère dans deux villages rivaux.
Effia est mariée de force à un britannique, capitaine du fort de Cape Coast et est contrainte d’aller y vivre, loin de son village.
Esi est capturée et vendue comme esclave aux britanniques. Elle achèvera sa vie dans les plantations de coton aux Etats-Unis.
Ces deux sœurs qui ignorent l’existence l’une de l’autre vont engendrer une descendance sur deux continents différents ayant une souffrance commune : la traite négrière et ses conséquences.

Mon avis…

Ce livre m’a immensément plu et profondément touchée à bien des égards.

Il m’a rarement été donné de lire un roman aussi bien documenté. Ne vous méprenez pas sur la qualification « roman ». Ce livre est une mine d’or qui regorge de références historiques relatées de manière chronologique. L’auteure a réussi la prouesse de nous faire revivre l’une des pages les plus sombres de l’histoire de l’Afrique et des Etats-Unis par le biais de personnages fictifs.

En sus du contexte historique, Yaa Gyasi nous livre une analyse brillante sur les conséquences psychologiques et psychiques qu’ont pu avoir la traite négrière sur la descendance des esclaves. Le récit couvre la vie de huit générations évoluant aux Etats-Unis et au Ghana sur près de trois siècles. Les premiers confrontés à l’esclavage puis à la ségrégation raciale et enfin aux injustices tentent de recouvrer leur identité dans une patrie qui leur a été imposée mais qui ne les a jamais vraiment reconnus. Les autres restés en Afrique n’ont pas moins souffert pris entre le désir de perpétuer le commerce triangulaire familial ou choisir une toute autre destinée moins prestigieuse.

La puissance de ce livre tient aussi de la richesse des thèmes abordés. Certes, les sujets fâcheux occupent une place centrale mais il ne saurait être vain d’évoquer la place occupée par ces puissants royaumes africains, visages de la résistance face à l’invasion de l’occident. La lecture des quelques passages consacrés à la prospérité économique de ces royaumes et aux combats qu’ils ont menés a fait naitre en moi un immense sentiment de fierté et de reconnaissance.

La sincérité et l’impartialité de l’auteure sont à saluer. Le récit ne s’est aucunement mué en apitoiement ou en lamentation. L’auteure est restée factuelle. L’histoire est retracée comme telle sans prise de partie, sans victimisation, sans accusation. Et c’est sans doute cela qui rend ce roman si exceptionnel.

Certes, il existe bon nombre d’ouvrages qui traitent de l’esclavage et de ses conséquences en Afrique comme aux Etats-Unis. La nouveauté dans « No home » est sans doute le regard porté sur ces royaumes très prospères qui ont existé avant l’arrivée des européens.  Selon moi, toute la grandeur du livre réside dans l’évolution et l’interaction de ces peuples africains outrageusement fiers de leur appartenance à leur royaume. On ne le dit sans doute pas assez, mais il y a eu et il subsiste des africains fiers de leurs origines. Ils étaient Ashantis, Fantis… Mais avant tout ils étaient africains. Ce livre offre un immense devoir de mémoire.

Je recommande « No home » sans réserve, aucune !

Avec passion,

Dyna.