L’Afrique humilié – Début de réflexions sur les causes profondes des migrations africaines

Je suis ravie d’avoir choisi de lire cet essai après les récits de vie d’Aya Cissoko. Les quatre livres s’emboîtent parfaitement. Les premiers offrent un aperçu du quotidien des immigrés noirs en France tandis que celui-ci s’intéresse aux causes profondes de l’immigration.

Les premières pages de cet essai m’ont renvoyée à une autre lecture, la BD “Péyi An Nou” de Jessica Oublié et Marie-Ange Rousseau. Elles y évoquent le BUMIDON, bureau qui s’occupait de l’organisation des migrations entre les DOM (Guadeloupe, Martinique, Guyane, La Réunion) et la métropole.

Le BUMIDOM permettait d’obtenir de la main-d’œuvre à moindre coût dans les DOM pour occuper les postes dont les Français de la métropole ne voulaient pas.

Dans ma lecture en cours, Aminata Traoré nous apprend qu’un tel système a également été mis en place pour les travailleurs africains au cours des trentes glorieuses (entre 1945 et 1975).

Durant cette période, la France avait besoin de main-d’œuvre pour sa reconstruction. Elle a ainsi fait appel aux Africains sans leur exiger un visa ou des diplômes.

Lorsque l’un de ces travailleurs prenait sa retraite et rentrait en Afrique, il était facilement remplacé par un frère ou un cousin. Les employeurs français détournaient les yeux car ce circuit était avantageux pour tout le monde : main-d’œuvre bon marché pour la France, réception dans le pays d’origine d’une aide financière envoyée par le travailleur. C’est d’ailleurs ainsi que le père d’Aya Cissoko est venu en France, en prenant la place et le nom de son frère rentré au Mali.

À partir de 1974, les lois Bonnet-Soléru mettent un terme à ce mouvement du fait de la récession économique en France. Les conditions d’accès à la métropole se durcissent.

Dans le même temps en Afrique, les crises et programmes d’ajustements structurels enclenchés par les institutions de Bretton Woods entraînent du chômage en masse. En perte de repères, les jeunes se tournent vers la France où résident parents et amis.

Mais les besoins de la France ont évolué entre temps. Ainsi commencent progressivement les migrations indésirables et soumises à de strictes conditions telles qu’on les connait aujourd’hui.

Que dire, à part qu’il est difficile de ne pas subir les conséquences d’un problème que l’on a soi-même créé.

Selon Aminata Traoré :

Jamais des jeunes originaires du Mali, du Sénégal, du Cameroun ou de la Côte d’Ivoire ne se seraient retrouvés comme un seul homme aux portes de l’Europe, […], si le FMI et Banque mondiale n’avaient pas infligé vingt années durant aux pays dont ils sont originaires la médecine de cheval de l’ajustement structurel, qui a brouillé les repères et brisé des vies. De part et d’autre de la Méditerranée, les jeunes ont en partage l’échec scolaire, le désœuvrement et le sentiment d’inutilité.

p.35

Je poursuis ma lecture et vous reviens avec de nouvelles réflexions.

Avec passion,

Dyna.